Nicolas Quint est linguiste, ingénieur agronome et directeur de recherches au CNRS. Ce spécialiste des langues minoritaires ou peu connues collabore avec Assimil depuis plus de dix ans, mais il a plus particulièrement consacré ces dernières années à l’élaboration d’une toute nouvelle méthode d’apprentissage de l’occitan, en version papier (désormais épuisée) mais aussi en version numérique. Il évoque ici cette aventure intellectuelle et éditoriale, ainsi que la place de l’occitan dans la société du XXIe siècle.
Assimil : Comment est né votre intérêt pour l’occitan ?
Nicolas Quint : L’occitan est une langue que j’ai entendue depuis mon enfance. Dans le village du Midi où je passais mes vacances, elle était pratiquée au quotidien par les personnes âgées, y compris dans ma propre famille. Ayant été élevé en région parisienne, j’ai toujours été intrigué par cette langue que j’entendais parler autour de moi l’été ou pendant les congés scolaires et dont, petit, je ne comprenais que des bribes. Lorsque j’ai grandi, j’ai décidé d’apprendre moi aussi l’occitan. J’ai d’abord commencé par pratiquer le parler de ma famille et, pour la langue écrite, je me suis beaucoup servi de la méthode Assimil d’Alain Nouvel ! J’ai ensuite voulu mieux connaître la langue d’oc. Pour ce faire, je l’ai étudiée à l’Université. De surcroît, afin d’approfondir mes connaissances pratiques, j’ai aussi séjourné dans plusieurs villages de l’espace occitan et partagé la vie de familles où la langue d’oc était employée au quotidien. Ces séjours ont débouché sur la publication de quatre grammaires portant sur diverses variétés locales d’occitan (deux parlées en Creuse, une en Ardèche et une autre dans les Alpes-de-Haute-Provence) et m’ont permis d’acquérir une expérience concrète sur différentes formes d’occitan parlé. Depuis plusieurs décennies, je lis aussi régulièrement des livres en occitan, de toutes les époques (du Moyen-Âge à nos jours) et dans la plupart des dialectes (auvergnat, gascon, languedocien, provençal…). J’aime entendre parler l’occitan et j’aime aussi le parler. Cette langue fait partie de mon identité et je suis toujours curieux de ce qui la concerne. Quand je voyage loin du Pays d’Oc, il m’arrive parfois de penser en occitan et souvent j’emmène dans mes bagages des ouvrages rédigés dans cette langue pour meubler les temps morts.
A : Qui peut vouloir apprendre l’occitan de nos jours et pour quelles raisons ? Autrement dit à quel public s’adresse votre méthode ?
N.Q. : L’occitan (ou langue d’oc) est la langue parlée traditionnellement dans une zone (parfois désignée sous le nom d’Occitanie) recouvrant approximativement le tiers Sud de la France métropolitaine ainsi qu’une douzaine de vallées alpines en Italie et le Val d’Aran en Espagne. L’espace occitan ainsi défini s’étend sur environ 180.000km2 et est peuplé de quinze millions d’êtres humains. Dans la majeure partie de cet espace, la langue d’oc a cessé d’être transmise aux enfants au cours du XXe siècle, dès avant la première guerre mondiale dans certaines grandes villes, parfois beaucoup plus tard dans les campagnes où on trouve, y compris en France, des personnes nées dans les années 1980 et ayant appris dans leur milieu familial l’occitan avant la langue nationale. L’occitan n’a donc pas l’intérêt pratique de langues de grande diffusion (comme l’anglais, le chinois ou l’espagnol) ou même de langues nationales d’usage plus restreint (comme le tchèque ou l’islandais), toutes employées par la quasi-totalité de la population dans des territoires donnés. Cependant, les faits sont là : l’occitan a été la langue principale de l’espace occitan jusqu’au siècle dernier, il reste la langue maternelle de plusieurs centaines milliers de personnes et la langue seconde (parlée et comprise à divers degrés) de plusieurs millions d’autres. On ne peut pas comprendre en profondeur l’histoire ni la culture du Pays d’Oc sans connaître l’occitan. Cette méthode d’occitan est donc destinée en priorité aux personnes vivant dans l’espace occitan ainsi qu’à celles qui en sont issues. Elle vise à leur donner un accès plus direct à la langue d’oc, qui continue d’imprégner d’une façon ou d’une autre l’ensemble de cet espace.
Mais l’apprentissage de l’occitan ne saurait bien entendu se limiter aux seuls Occitans ! Comme toute langue, l’occitan appartient avant tout à ceux qui la parlent ou ont envie de la découvrir et son apprentissage peut être une ouverture (ou un plus !) pour tout un chacun. Ainsi, on peut tomber amoureux du Pays d’Oc, de ses villes ou de ses campagnes, de ses plages ensoleillées, de ses montagnes (des Alpes aux Pyrénées en passant par le Massif Central), et avoir envie d’en connaître la langue. Par ailleurs, l’occitan est toujours activement pratiqué, en particulier en zone rurale et aussi par de nombreux militants culturels : si vous l’apprenez, vous trouverez donc des gens à qui le parler. Par ailleurs, la connaissance de l’occitan vous fournira aussi un accès privilégié au riche patrimoine littéraire occitan : des milliers de livres (romans, essais, poèmes, traités scientifiques…) ont été écrits ou traduits dans cette langue, sans interruption et depuis près d’un millénaire, et chaque année de nouvelles compositions en occitan voient le jour (la chanson en occitan se porte bien elle aussi). Si vous êtes un language freak (‘passionné de langues’), comme disent nos amis anglo-saxons, cette méthode d’occitan est bien sûr aussi faite pour vous : les sons, les conjugaisons, la syntaxe… de la langue d’oc, tout en présentant d’indéniable points communs avec les autres langues romanes (français, espagnol, italien, portugais, roumain…), recèlent assez de traits originaux pour nourrir durablement votre curiosité !
A : Où enseigne-t-on l’occitan aujourd’hui ? Quel rôle peut-il jouer à l’avenir ?
N.Q. : C’est un des grands paradoxes de la situation actuelle de l’occitan. Jamais cette langue n’a été aussi peu parlée mais jamais elle n’a été autant enseignée ! Aujourd’hui, plusieurs dizaines de milliers d’élèves (tous niveaux confondus) reçoivent chaque année un enseignement en occitan dans l’ensemble du Pays d’Oc. Depuis 1979, il existe même des écoles privées, les calandretas (‘alouettes’ en occitan gascon) où l’occitan est la langue principale d’enseignement : environ 3000 élèves y sont désormais scolarisés. Plus récemment, on a aussi ouvert des sections bilingues occitan/français pour les enfants dans l’enseignement public. De ce fait, il y a vraisemblablement plus d’enfants capables de s’exprimer en occitan aujourd’hui qu’il y a 20 ans. Ce regain d’intérêt montre que l’occitan n’a peut-être pas encore dit son dernier mot.
En effet, si tant de jeunes reçoivent en ce moment une formation en occitan alors que cette langue apporte si peu d’avantages économiques aux gens qui la parlent, c’est que beaucoup de Méridionaux tiennent à conserver à l’occitan un rôle significatif dans leur environnement culturel et social. Ainsi, au cours des vingt dernières années, des sondages ont été faits à plusieurs reprises dans différentes régions du Sud de la France sur la perception que les habitants avaient de la langue occitane. Dans l’ensemble, la majorité des populations concernées a déclaré son attachement à la langue d’oc et s’est montrée favorable à son enseignement. Autre donnée intéressante : le pourcentage de sondés ayant affirmé parler ou pratiquer l’occitan était visiblement supérieur aux chiffres auquel on pouvait raisonnablement s’attendre. Ces résultats semblent donc indiquer que, même si la langue d’oc est moins parlée aujourd’hui qu’il y a quelques décennies, elle occupe toujours une place de choix dans le cœur et dans le sentiment identitaire de nombreuses personnes habitant le Pays d’Oc, qu’elles soient occitanophones ou non. Cet attachement des populations concernées est le plus sûr garant de l’avenir de l’occitan. C’est ce même attachement qui donne du sens à la production d’outils didactiques (tels que cette nouvelle méthode Assimil) pour l’enseignement de l’occitan.
A : Continue-t-on de créer de nouveaux mots en occitan pour décrire les nouveaux objets et les nouveaux concepts, par exemple le langage d’Internet, du web, etc. ?
N.Q. : Oui, il existe des individus et des groupes de défenseurs de l’occitan qui s’efforcent de créer de nouveaux mots (ou de développer de nouveaux sens pour des termes déjà établis) afin que la langue d’oc puisse répondre aux défis de la modernité. Ainsi, pour traduire les termes informatiques ‘pirater’ et ‘mél/couriel’ certains ont suggéré respectivement les formes rapugar (extension de sens d’un verbe signifiant à l’origine ‘grappiller’) et maile (adaptation de l’anglais mail à la prononciation et à la graphie occitanes). Le fait que de tels efforts soient régulièrement entrepris montre ici encore qu’un certain nombre de Méridionaux croient au futur de la langue occitane.
A : L’occitan se subdivise en six dialectes principaux. Comment ces dialectes vivent-ils ensemble ? Est-ce que cela recoupe des communautés clairement identifiables ?
N.Q. : La plupart des linguistes spécialistes de l’occitan considèrent en effet que cette langue compte six principaux ‘dialectes’ ou variantes régionales : l’auvergnat, le gascon, le languedocien, le limousin, le provençal et le vivaro-alpin. En fait, la question des variantes de l’occitan est beaucoup plus complexe que ne le laissent paraître ces six étiquettes. Tout d’abord, les frontières entre ces dialectes sont loin d’être toujours tranchées sur le terrain : par exemple, dans le Massif Central, tout le monde n’est pas d’accord pour dire où finit l’auvergnat et où commence le vivaro-alpin, aux confins de la Haute-Loire et de l’Ardèche. En outre, les aires dialectales ne correspondent pas non plus aux régions administratives (dites aussi ‘de programme’). Par exemple, le languedocien est effectivement parlé dans la plus grande partie du Languedoc-Roussillon mais aussi dans une bonne moitié de la région Midi-Pyrénées. Et la question des variétés de l’occitan ne s’arrête pas là ! À l’intérieur de chacune des six fameuses zones dialectales, il existe des identités locales parfois très fortes, y compris sur le plan linguistique. Ainsi, beaucoup de Béarnais (habitants de l’Est des Pyrénées-Atlantiques) ont conscience d’avoir des spécificités linguistiques (et culturelles) propres au sein de l’ensemble gascon ; il en va de même pour les habitants du Velay (province recouvrant la majorité du département de la Haute-Loire) en Auvergne, etc. Il faut encore rajouter à cela l’existence de plusieurs variétés littéraires (employées à l’écrit) occitanes, dites ‘standard’ et dont les caractéristiques grammaticales ne correspondent pas toujours à celles de l’occitan parlé ! Les deux plus célèbres de ces variétés écrites sont probablement le provençal rhodanien – employé par l’écrivain Frédéric Mistral, qui a accompli l’exploit d’obtenir le Prix Nobel de littérature pour ses œuvres en occitan – et le languedocien littéraire. Ces variétés sont toutes les deux représentées dans cette nouvelle méthode Assimil d’occitan…
La diversité interne de l’occitan est donc impressionnante. Cependant, dans la plupart des cas, ces différences entre parlers locaux et régionaux n’empêchent pas les occitanophones de se comprendre entre eux. Ainsi lorsque, pour les besoins de cette méthode, j’ai effectué à Turin l’enregistrement d’une leçon en occitan du Piémont, la personne qui a assuré le suivi technique de l’opération était elle-même occitanophone et c’est en occitan que nous avons communiqué (sans trop d’efforts) pendant cette séance de travail, malgré les nombreuses différences entre les parlers que nous utilisions.
A : Pouvez-vous nous dire en quelques mots ce qui caractérise cette nouvelle édition de l’Occitan par rapport à d’autres méthodes comparables ?
N.Q. : Dans l’Occitan, j’ai voulu proposer aux lecteurs trois grands axes pour aborder l’étude et l’apprentissage de la langue d’oc. Tout d’abord (premier axe d’apprentissage), j’ai choisi une forme standard de la langue qui a servi de référence tout au long de l’ouvrage, afin que l’utilisateur puisse construire ses connaissances sur une base stable et solide. Ce standard est l’occitan languedocien littéraire (OLL). En soi, cette variété n’est pas meilleure qu’aucune des autres variétés de la langue d’oc. Le choix de l’OLL présente simplement un certain nombre d’avantages pratiques. En effet, le languedocien (qui a servi de base à l’OLL) est parlé dans une zone qui correspond à peu près au centre géographique de l’espace occitan : de ce fait, il est plus facile de comprendre la plupart des autres variétés de l’occitan à partir du languedocien (ce serait moins facile avec une variété excentrée comme point de départ). Autre avantage de l’OLL (et du languedocien en général) : cette forme d’occitan est relativement archaïque (elle conserve par exemple des consonnes finales disparues dans d’autres variétés) et, une fois qu’on l’a acquise, on peut aussi l’utiliser comme base pour aborder l’étude de l’occitan médiéval, qui reste une référence absolue pour l’identité culturelle occitane. Enfin, l’OLL a été relativement bien décrit par les grammairiens qui m’ont précédé, ce qui en rendait l’utilisation plus facile dans le cadre d’une méthode d’enseignement de l’occitan. La première moitié de la méthode consiste donc en un apprentissage systématique de l’occitan languedocien littéraire, dont la prononciation, l’orthographe, la morphologie (pluriel des noms, conjugaisons…) et la syntaxe (ordre des mots) sont expliqués en détail au fur et à mesure des leçons et en suivant la méthode d’apprentissage progressif par imprégnation mise au point par Assimil.
Toutefois, il n’était pas pensable pour moi de proposer au public une méthode d’occitan qui ne prenne pas en compte au moins une partie des innombrables variétés qui constituent finalement une des richesses de l’occitan moderne et contribuent à conférer une saveur particulière à cette langue. Dans la seconde moitié de la méthode, j’ai donc proposé au lecteur une découverte progressive (second axe d’apprentissage) de ces variétés. Les six grands dialectes y sont tous représentés et illustrés chacun par divers textes d’auteurs appartenant aux genres les plus divers : extraits de romans ou de pièces de théâtre, poèmes, interviews, recettes de cuisine, etc. Il y a aussi des textes dans les variétés occitanes pratiquées traditionnellement en Espagne et en Italie : c’est à ma connaissance la première fois que ces parlers sont explicitement pris en compte dans une méthode générale d’occitan. Par ailleurs, j’ai tenu, à travers une série de leçons dédiées, à fournir un aperçu de l’occitan médiéval (également illustré par des textes d’auteur), afin que l’apprenant puisse avoir un panorama aussi complet que possible des variétés occitanes, dans l’espace comme dans le temps.
Enfin, au moyen des notes culturelles, utilisées dans les méthodes Assimil, j’ai essayé (troisième axe d’apprentissage) de donner accès au lecteur à des éléments insolites ou relativement méconnus du patrimoine et de l’histoire des Pays d’Oc. Par exemple, tout le monde ne sait pas que le roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion ne connaissait pas l’anglais mais était par contre tout à fait à son aise en occitan, et seul un nombre réduit de spécialistes est au courant du fait que la langue d’oc dispose d’une tradition littéraire en caractères hébraïques ou encore que, pendant des siècles, il a existé dans certaines régions de l’Occitanie, une caste de parias comparable aux Intouchables de l’Inde… Il s’est passé tant de choses originales et passionnantes dans tous les recoins de l’espace occitan ! J’ai voulu partager avec mon lecteur quelques-uns de ces faits, que j’ai parfois moi-même découverts pendant la préparation de cette méthode.
A : Dans le Sud de la France, l’occitan est assez présent dans les mots du quotidien, souvent sans qu’on le sache. Pouvez-vous nous donner des exemples ?
N.Q. : Dans la plupart des régions de tradition occitane, l’occitan a laissé de nombreuses traces dans les nombreuses variétés de français régional qui l’ont remplacé ou coexistent avec lui. Ainsi, l’exclamation du français méridional peuchère est-elle une adaptation phonétique de l’occitan pecaire, qui signifie ‘pécheur’. Les calanques de Cassis et les restanques de l’arrière-pays provençal sont deux autres exemples typiques de termes provenant de la langue d’oc et qui se sont intégrés avec succès dans le français local. L’occitan transparaît également dans les noms de nombreux plats locaux, tels le cassoulet (de l’occitan caçolet, ‘petite casserole en terre cuite’) ou le confit (de l’occitan confit, participe passé du verbe confir, ‘faire cuire (de la viande) dans sa graisse’). Mentionnons encore le verbe ensuquer, ‘abrutir, assommer, endormir’ (de l’occitan ensucar, ‘assommer’), lui aussi souvent entendu dans les conversations.
De plus, le français parlé dans le tiers Sud du pays présente aussi un grand nombre de tournures tout droit issues de la langue d’oc. Ainsi, dans le Nord du Limousin, il n’est pas rare d’entendre ça pleut au lieu de il pleut en français standard. Ce ça pleut est un calque des parlers locaux occitans où ‘il pleut’ se dit effectivement qua pleu ou qua plòu (littéralement ‘ça pleut’).
Notons enfin que l’influence de l’occitan sur le français ne se limite pas aux régionalismes. De nombreux termes courants du français standard (commun à la majorité des francophones) ont été empruntés à la langue d’oc : c’est le cas par exemple des mots amour et abeille. Quant à la formule française familière kézako, que l’on voit parfois apparaître dans les titres chocs de certains magazines à la mode, elle provient directement de l’occitan qu’es aquò ?, qui signifie littéralement ‘qu’est cela ?’, c’est-à-dire ‘qu’est-ce que c’est ?’
A : Cet ouvrage a reçu le concours de nombreux organismes et spécialistes. Le Ministère de la Culture et l’Union Latine notamment. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
N.Q. : Cette méthode Assimil d’occitan a été effectivement une aventure collective ! Je suis l’auteur de l’ouvrage mais, au cours de son élaboration, j’ai été aidé par plusieurs dizaines de collaborateurs qui m’ont apporté leur concours à divers moment. Tout d’abord, il y a eu l’équipe Assimil, et en particulier mes trois conseillères éditoriales successives, qui ont vérifié pour chaque leçon (et à plusieurs reprises) la cohérence des textes, leur conformité au cahier des charges et la qualité de mon français. Ensuite, l’ensemble de ces leçons a été relu par quatorze experts (chercheurs ou enseignants) spécialistes des diverses variétés et parlers occitans présentés tout au long de la méthode. Plus de trente locuteurs de ces différentes variétés d’occitan ont ensuite participé aux enregistrements, afin que les usagers de la méthode puissent se faire l’oreille à la diversité des accents et intonations qui caractérisent chacun des multiples terroirs et contrées du Pays d’Oc.
Normalement, pour une méthode Assimil, on compte seulement cinq intervenants extérieurs : un expert spécialiste de la langue pour l’ensemble de l’ouvrage et quatre locuteurs pour les enregistrements… Le projet Assimil Occitan a donc pris des dimensions un peu inhabituelles, en grande partie liées à la prise en compte des variantes dialectales.
Pour que ledit projet soit viable, il fallait donc trouver des appuis supplémentaires, lesquels nous ont été apportés par l’Union Latine et le Ministère de la Culture. Ces soutiens semblent cohérents eu égard à la nature des organismes concernés. En effet, l’Union Latine a pour but de mettre en valeur les langues romanes et les cultures et qui leur sont associées et l’occitan est une langue romane. En ce qui concerne le Ministère de la Culture, c’est par l’intermédiaire de la Délégation Générale à la Langue Française et aux Langues de France (DGLF-LF) qu’il a soutenu la méthode. Plus de 90% de l’espace occitan et 98% environ de sa population se trouvent en France : l’occitan est donc une langue de France au plein sens du terme et la culture occitane est de ce fait une composante du patrimoine national français. En pratique, ces subventions officielles ont surtout été déterminantes pour couvrir les frais de déplacement et de matériel occasionnés par les enregistrements, où j’ai dû faire un vrai ‘tour d’Occitanie’ pour aller à la rencontre des locuteurs de chacune des variétés d’occitan illustrées dans la méthode et pour trouver des studios susceptibles de les enregistrer à proximité de leur domicile. En tant qu’auteur, je garde un souvenir inoubliable de ces voyages et de ces moments passés avec les nombreux occitanophones (et le personnel des studios qui nous ont accueillis !) qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour transmettre aux futurs utilisateurs de l’ouvrage ce qu’ils savaient de l’occitan de leur région. Peut-être le moment le plus extraordinaire (pour moi) a-t-il été celui où je me suis rendu dans le village de Guardia Piemontese (en Calabre, dans le Sud de l’Italie), dont la population a su préserver l’usage de l’occitan jusqu’à aujourd’hui après avoir quitté la zone occitanophone il y a plus de sept siècles. Si vous utilisez la méthode, vous pourrez entendre un texte occitan lu avec l’accent gardiol (c’est-à-dire du village de Guardia) : il se trouve à la leçon 90 !
A : Le mot de la fin ?
N.Q. : J’espère que cette méthode contribuera à développer l’intérêt de mes lecteurs pour la langue et la culture occitanes et qu’ils prendront autant de plaisir à utiliser l’Occitan sans peine que j’en ai pris à le leur préparer.
- L’occitan, collection Sans Peine, Version numérique (e-méthode), 49,90 €.
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