Qui parle le breton aujourd’hui ?
Parmi les langues régionales françaises encore parlées aujourd’hui, le breton fait figure d’exemple. D’une manière globale, aux quatre coins du pays, la sauvegarde des dialectes et des langues locales s’est intensifiée au cours des dernières années, voire des décennies.
Une langue régionale multisupports
Mais le breton a, lui, su se préserver, s’enseigner, séduire et continuer à se développer via de multiples supports. Cela peut être grâce à l’enseignement à l’école renforcé, mais pas seulement. Le breton perdure aussi via des médias régionaux nombreux. On peut, par exemple, citer :
- les émissions en breton existant sur les antennes régionales de France 3 ;
- des chaînes de télé locales comme Tébéo, TV Rennes 35 ou Tébésud ;
- les chaînes locales de France Bleu qui diffusent des programmes en breton ;
- en presse écrite : le mensuel Bremañ qui existe depuis le début des années 1980, ou l’hebdomadaire Ya ! fondé dans les années 2000 ;
- sur Internet : avec la web TV, Brezhoweb, ou des plateformes de vidéos à la demande comme Breizhvod.
Mais le breton se montre également présent dans les magasins, sous forme de marques. Parmi les plus connues à revendiquer fièrement leurs souches bretonnes, on peut par exemple citer le Breizh Cola, cousin armoricain d’un célèbre soda gazeux.
Combien de locuteurs bretons ?
Mais pour en revenir aux locuteurs, plus concrètement : combien de personnes parlent le breton – ou en maîtrisent quelques bases – aujourd’hui ? Selon une étude menée par la Région Bretagne, fin 2018, plus de 200 000 locuteurs parlent cette langue régionale dans les cinq départements de la Bretagne historique : Côtes d’Armor, Finistère, Morbihan, Ille-et-Vilaine et Loire-Atlantique. Pour ne pas nous fâcher avec nos amis Nantais, rappelons que la Loire-Atlantique est actuellement située dans la région Pays de la Loire.
Selon la même étude, 5,5% des habitants de la région parlent breton, 3,5% comprennent très bien ou assez bien cette langue régionale sans la parler. Et, tout de même, 31% maîtrisent quelques mots ou expressions en breton, alors que 40% possèdent au moins quelques connaissances dans la langue.
Autre langue bretonne concernée par l’étude : le gallo. Cette langue est davantage parlée dans ce que l’on peut appeler la Haute-Bretagne. Autrement dit, dans les départements d’Ille-et-Vilaine et de Loire-Atlantique et dans les parties orientales du Morbihan et des Côtes-d’Armor.
Environ 195 000 personnes parlent le gallo, soit 5% des Bretons. Et 24% affirment posséder quelques connaissances dans cette langue.
Des locuteurs vieillissants mais une attente forte
Il est toutefois important de préciser que l’âge moyen des locuteurs est de 70 ans. C’est 7 ans et demi de plus qu’une précédente étude datant de 2007. Le constat est implacable : on assiste à un vieillissement des locuteurs bretons.
Pourtant, les espoirs de voir la langue perdurer ne sont pas vains : en effet, de grosses attentes existent autour du breton. Ainsi, près de trois-quarts des personnes interrogées demandent davantage d’enseignement du breton à l’école. Et plus de la moitié (55%), à ce qu’il y ait plus d’émissions en breton à la télévision. Et de ce côté, des moyens existent déjà.
L’enseignement du breton à l’école
Si la langue bretonne reste encore très parlée aujourd’hui, elle le doit notamment à l’école. Les langues régionales font incontestablement partie de la culture française et il paraît important de les préserver en les enseignant aux plus jeunes générations. Et pourtant, le breton, comme les autres langues, reviennent de loin.
Car pendant de longues décennies, elles ont été les victimes de la politique linguistique de l’État, qui voulait faire du français la seule et unique langue enseignée sur les bancs d’école, dès la fin du XIXe siècle. Politique qui voulait asseoir le sentiment d’appartenance national, en allant jusqu’à punir les enfants qui parlaient breton. On leur accrochait ainsi un sabot autour du cou, sorte de bonnet d’âne symbolisant une appartenance péjorative au monde paysan.
La transmission s’est donc progressivement réduite, au point de mettre le breton – et toutes les langues régionales – en péril. Il a fallu attendre, dans un premier temps, 1951 et la loi Deixonne, qui autorise l’apprentissage de langues régionales en option.
Mais l’apprentissage de la langue bretonne va prendre un important virage dès 1977 avec la création des premières écoles Diwan (« germer », « sortir de terre » en breton). Il s’agit d’écoles gratuites, associatives, majoritairement privées, laïques et, surtout, où l’enseignement est donné en breton. Le concept s’est largement développé puisqu’aujourd’hui, ce sont près d’une cinquantaine d’établissements Diwan qui sont implantés au sein des cinq départements historiques, de l’école maternelle jusqu’au lycée.
Parallèlement, en avril 2021, une loi sur les langues régionales a été adoptée à l’Assemblée. L’enseignement du breton (mais aussi du corse, du catalan ou encore de l’occitan) s’en retrouve donc renforcé. Cette loi propose trois axes principaux :
- un enseignement immersif : les établissements publics peuvent proposer une filière d’enseignement immersif du breton, en option, et sans préjudice pour l’acquisition du français ;
- une généralisation de l’apprentissage du breton : les élèves qui le souhaitent pourront apprendre le breton de façon optionnelle, dans le cadre de l’horaire normal d’enseignement, depuis la maternelle jusqu’au lycée ;
- un forfait scolaire : les maires qui ne disposent pas d’écoles bilingues peuvent allouer un budget pour les écoliers qui suivent un enseignement de langue régionale hors de leur commune.
Enfin, toujours en mesure d’enseignement, on peut noter que depuis la rentrée des classes 2021, le Centre national d’enseignement à distance (CNED) propose un enseignement du breton à distance pour les élèves de première et de terminale. Cela fait du breton la toute première langue régionale enseignée à distance par le CNED.
Autant de dispositifs mis en place afin de contribuer à la survie de la langue bretonne via un rajeunissement de ses locuteurs. Enseigner cette langue régionale aux enfants et adolescents reste un excellent moyen de croire qu’à leur tour, une fois adultes, ils poursuivront cet enseignement, en pouvant s’appuyer sur des outils pédagogiques solides.
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