Sujet de débats et de controverses ces dernières années, le catalan est avant tout une langue romane qui s’est étendue sur de nombreuses régions. Facilement associée à la Catalogne, puisque son berceau est sur un périmètre entourant Barcelone et Gérone, elle est loin de s’y limiter. Le catalan, en réalité, représente près de 10 millions de locuteurs. Décryptage de cette langue riche d’histoire.

Le catalan est-il une langue ou un dialecte ?

À l’instar du basque ou de l’occitan, le catalan est riche d’une histoire faite de territoires conquis. La zone péninsulaire dont provient le catalan a permis son enrichissement linguistique au fil des événements et conflits historiques. Bien qu’il y ait alors différents catalans qui soient compris et parlés, selon les zones d’expansion et de prolifération, il s’agit bien avant tout d’une langue à dialectes.

Cette langue romane, de fait, puise son origine dans le latin vulgaire, utilisé à l’oral pendant des siècles, notamment en Hispanie. C’est à partir du XIIème siècle que des textes de loi et d’Église font apparaître le catalan à l’écrit. Au fil des siècles, le catalan, langue à part entière, se distingue en de multiples dialectes :

  • les dialectes catalans constitutifs, issus d’une évolution sur le territoire même ;
  • les dialectes consécutifs, évoluant suite à une conquête et un repeuplement, à l’exemple de la conquête des Baléares par les Catalans et celle de Valence par les Aragonais, entraînant deux dialectes bien distincts.

Le catalan se parle-t-il ailleurs qu’en Catalogne ?

Son aire linguistique s’étend sur quatre pays différents, souvent désignés comme « Pays catalans ». Le catalan s’étend donc, avec plus ou moins de poids, sur :

  • la Catalogne, avec Barcelone en son coeur ;
  • la principauté d’Andorre ;
  • la région de Perpignan, dans le sud de la France ;
  • le pays de Valence, sous la Catalogne ;
  • la frange de l’Est, à l’est de l’Aragon, en frontière catalane ;
  • la région de Carxe, située dans le territoire de la Murcie ;
  • les îles Baléares, conquises aux arabes par les Catalans ;
  • la ville d’Alghero, en Sardaigne, avec 28 500 locuteurs sur 40 800 habitants.

Si le catalan se parle alors dans plusieurs endroits, il serait absurde de donner autant de poids à cette langue en France ou en Italie qu’elle en a en Catalogne ou à Andorre. Une forme de loyauté se distingue pour le catalan dans ces régions. 40 % de la population d’Andorre, par exemple, considère le catalan comme leur langue maternelle.

Dialecte ou standard : quelle est la norme pour le catalan ?

Les linguistes s’accordent à le dire : la langue catalane a connu peu de variations, étant très unifiée jusqu’au XVème siècle. Des locuteurs catalans de différents dialectes peuvent ainsi se comprendre facilement. Au contraire, les dialectes allemands ou basques n’offrent pas cette facilité.

Une véritable norme grammaticale et linguistique a tout de même été définie par Pompeu Fabra, linguiste espagnol. Le catalan standard s’adapte alors à chaque territoire, peu importe les dialectes et leur importance. L’apprendre se révèle toutefois d’une richesse extrême, puisant dans chacune de ses histoires et l’ensemble de ses dialectes.

Bien que le catalan soit une langue à part entière, certains dialectes pèsent davantage que d’autres. Cela s’explique, notamment, par le poids démographique, politique ou même économique de certaines localisations sur le dialecte. Barcelone et son catalan central, par exemple, aura un poids plus important que celui d’autres localités. Cela se ressent d’autant plus dans le standard catalan, mélange de tous les dialectes, du catalan de la Renaissance au contemporain.

Langue mineure ou langue officielle : comment est considéré le catalan selon les régions ?

La sensibilisation des publics et des institutions à la disparition des langues touche tout autant la question du catalan. Selon des linguistes, elle serait alors une langue intermédiaire, aussi normalisée qu’elle est minorisée. L’intérêt pour le catalan va pourtant en grandissant, avec 500 000 locuteurs supplémentaires recensés dans les 10 dernières années. Cela s’explique, notamment, par l’engouement des institutions, des médias et des individus pour la préservation de leur langue.

Andorre est toutefois le seul pays qui, sur l’ensemble de son territoire et de ses institutions, considère le catalan comme langue officielle. En Espagne, par exemple, la langue catalane n’est une langue officielle que pour les communautés autonomes en Catalogne, Valence et Baléares. Similairement, si le catalan a un statut officiel à Alghero et dans les Pyrénées-Orientales, la langue reste en réalité minoritaire.

Pourquoi le catalan est-il plus parlé en Espagne qu’en France ?

La chute de Franco, en 1975, signe une ère nouvelle pour le catalan en Espagne. La région de Barcelone, surtout, met en avant cette langue dont le dialecte central est issu. Si le catalan peine à s’imposer en France, malgré des institutions qui remettent au coeur l’importance des langues régionales, c’est en réalité parce que l’Espagne a eu quelques avantages :

  • le français s’est standardisé bien plus rapidement que le castillan ne s’est imposé en Espagne ;
  • le castillan de la royauté espagnole s’opposait au catalan des bourgeois barcelonais, qui continuaient de pratiquer et défendre leur langue ;
  • l’unité française, créée par de nombreux conflits contre des pays européens, ne se reflète pas chez les espagnols : au contraire, des divisions se marquent profondément entre Madrid et Barcelone, par exemple ;
  • là où la France associe les langues régionales à l’Ancien Régime, c’est le contraire qui anime l’Espagne, le catalan marquant une rupture avec le castillan imposé par Franco.

En quoi le catalan est-il le symbole du conflit d’indépendance de la Catalogne ?

Le pouvoir politique du catalan a gagné en ampleur, d’autant plus dans les dernières années avec les vœux d’indépendance de la Catalogne. Cette dernière, souhaitant se démarquer du reste de l’Espagne et de son utilisation du castillan, n’hésite pas à mettre en avant sa langue régionale officielle.

Les administrations et médias publics, surtout, espèrent un monolinguisme. Cela crée des sources de tension, notamment entre des Catalans d’origine et des nouveaux venus. Ils se révèlent perdus entre un monolinguisme assumé dans le public et le bilinguisme réel qui s’applique dans le cadre privé.

Le catalan représente toutefois plus qu’un moyen de communication aux yeux de la Catalogne, étant un véritable symbole de son identité et de cohésion. Il s’apparente là au basque, langue régionale officielle du Pays basque. Bien qu’elle ne soit parlée que par environ 1 million de locuteurs, le basque est tout de même symbole d’une région qui a n’a pas la langue dans sa poche et a souvent même été violente dans ses revendications indépendantistes.

L’enjeu pour les langues régionales est alors de ne pas se laisser remplacer par des langues à plus grande échelle, comme le français ou l’italien. Le basque comme le catalan, en Espagne comme dans les Pyrénées, ouvrent l’esprit vers une richesse historique et linguistique unique. Le combat, plutôt que du monolinguisme catalan, serait alors celui de la cohabitation linguistique.

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