Photo : Fribourg.
La Suisse se distingue des autres pays européens par ses quatre langues nationales : l’allemand, l’italien, le romanche, mais également le français. La langue française en Suisse, appelée aussi le suisse romand, est la deuxième langue majoritaire dans le pays, derrière le suisse alémanique. Quelles sont les différences avec le français parlé dans l’Hexagone ? Le suisse romand est-il une variante de la langue française ?
La Suisse romande, chef-lieu du français en Suisse
La Suisse romande, ou Romandie, représente la partie francophone de la Suisse au sein de laquelle les habitants parlent couramment le français. Il s’agit de la partie ouest du pays recouvrant les cantons suivants : Jura, Neuchâtel, Genève, Vaud et une partie des cantons bilingues du Valais, de Fribourg et de Berne.
D’après une étude sur la langue, la religion et la culture réalisée en 2019 par l’Office fédéral de la statistique, 22,8 % des résidents permanents en Suisse déclarent avoir le français comme langue principale (62,1% pour l’allemand, 8 % pour l’italien et 0,5 % pour le romanche). Par ailleurs, l’étude précise qu’en Suisse romande, le français est parlé par quasiment toute la population, à hauteur de 99 %.
À noter que le français parlé dans les différents cantons n’est pas homogène, du fait d’accents variés et de lexiques différents. D’après les linguistes Knecht et Rubattel, le français parlé dans le canton de Vaud est par exemple considéré comme quelque peu « rural » voire « rustique », tandis que les accents genevois ou neuchâtelois bénéficient d’un renom certain.
Le lexique typique du suisse romand
Les Français de France aiment imiter ce qu’ils perçoivent comme l’accent suisse, facilement identifiable selon eux. Le stéréotype de cet accent a d’ailleurs été repris dans les années 1980 dans la publicité Ovomaltine très connue, où un skieur à la combinaison jaune clame : « Ovomaltine, c’est de la dynamite ! » avec un accent traînant et presque chantant.
Au-delà de l’accent, le vocabulaire du suisse romand se distingue du français « standard » par quatre types de particularités : les emprunts aux dialectes romands, les statalismes, les archaïsmes et les germanismes.
Les emprunts aux dialectes romands
Le suisse romand comprend un certain nombre de mots et d’expressions dérivés d’un dialecte roman ou patois. Il s’agit, en d’autres termes, de dialectismes, parmi lesquels :
- pédzer signifiant coller ;
- de la gogne pour du travail mal fait ;
- un gonfle au pied pour évoquer une ampoule ou une cloque ;
- il roille pour dire il pleut à torrent ;
- être sur Soleure, correspondant au « être pompette » en français, etc.
Les statalismes
Les statalismes correspondent aux innovations ou aux évolutions internes du français de Suisse romande. Les expressions suivantes en font partie :
- tout de bon – souhaiter le meilleur quand on quitte quelqu’un ;
- ça joue – ça marche ;
- rester croché – être accroché / coincé ;
- la fourre à natel – la housse de portable ;
- faire la potte – faire la tête, être de mauvaise humeur ;
- je me suis chié – je me suis trompé ;
- un signofile – un clignotant ;
- se rincer le gosier – boire un petit coup ;
- une maman de jour – une nounou, etc.
Les statalismes renvoient également aux institutions : le mot « maire » français équivaut en effet au mot syndic dans les cantons de Vaud et de Fribourg, et au mot président dans les cantons de Valais et de Neuchâtel. Les cantons de Genève et du Jura utilisent quant à eux le mot « maire » comme dans l’Hexagone.
Les archaïsmes
Les archaïsmes sont ces dérivés de l’ancien français qui perdurent dans le suisse romand. Les plus connus sont les termes septante (pour soixante-dix) et nonante (pour quatre-ving-dix). De même, les Suisses parlent de déjeuner (pour le petit-déjeuner français), de dîner (pour le déjeuner) et de souper (pour dîner).
D’autres mots de vocabulaire sont classés parmi les archaïsmes, notamment :
- jaquette – gilet ;
- bobet – idiot ;
- faire un clopet – faire une sieste ;
- une panosse – une serpillère ;
- une fourre – une pochette pour ranger des documents ;
- entrez sans heurter – entrez sans frapper, etc.
Les germanismes
Les germanismes sont des expressions dérivées de l’allemand. Le plus connu est le mot poutser (ou poutzer) de l’allemand putzen pour signifier « nettoyer, faire le ménage ». On peut également citer le terme catelle – de l’allemand Chachle – pour un « carreau » ou encore le mot caquelon – du mot allemand Kachel – pour désigner une marmite à fondue, un poêlon à queue ou une petite casserole en terre.
Bon à savoir
Cette catégorisation des variations distinguant le français de Suisse romande du français traditionnel a notamment été élaborée par l’auteur Charoenwutipong, dans l’ouvrage « Le français de Suisse romande », écrit en 2016.
Les particularités phonétiques du suisse romand
Le français de Suisse se distingue du français de l’Hexagone par différents aspects de la prononciation. D’abord, les Suisses francophones marquent la différente entre un « o » fermé et un « o » ouvert, contrairement aux français qui utilisent principalement le « o » fermé, prononçant ainsi de la même manière les mots « peau » et « pot », par exemple.
Ensuite, les voyelles courtes et les voyelles longues sont opposées en suisse romand, ce qui confère un rythme jugé un peu plus traînant, voire chantant, comparé au français traditionnel de France.
La syntaxe singulière du suisse romand
Le suisse romand dispose d’une syntaxe particulière, avec notamment un ordre des mots différents du français de l’Hexagone. En Suisse, certains habitants disent ainsi « tu vas ça manger » (« tu vas manger ça » en France) ou encore « je n’ai personne vu » (« je n’ai vu personne »). Par ailleurs, en Suisse romande, la préposition « à » est parfois utilisée avant un complément d’objet direct désignant une personne. De ce fait, les Suisses peuvent « aider à quelqu’un », contrairement aux Français qui peuvent éventuellement « aider quelqu’un ».
Par conséquent, la langue parlée sur le territoire suisse francophone se distingue du français de France à plusieurs niveaux linguistiques tels que le vocabulaire, la syntaxe ou encore la phonétique. Malgré tout, ces variations n’empêchent pas la compréhension entre les habitants des deux pays.
Le saviez-vous ?
Certains mots d’origine suisse ont migré vers la France, tels que les termes « trottinette » et « chalet ». Au niveau de la gastronomie, la Suisse offre également les mots « fondue », « raclette » et « rösti » à la langue française de l’Hexagone.
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